mercredi 10 juillet 2013

Aux fondements de la crise malienne : la formation inachevée* de la nation Esquisse historique








QUELLE NOUVELLE GOUVERNANCE AU MALI ?
Assemblée Nationale, 16 mai 2013 
COLLOQUE


Intervention de André Marty, Sociologue


Il m’a été demandé d’introduire la question des fondements de la crise malienne actuelle. Le sujet est tellement complexe que je me suis vu obligé, pour le temps court d’un exposé, de choisir un angle d’approche limité permettant cependant d’aborder des aspects essentiels de la problématique. Pour ce faire, je pars du constat suivant : depuis l’Indépendance, les crises politiques et sécuritaires dénommées « rébellions » se sont répétées au Nord en s’aggravant chaque fois. Les solutions trouvées aux différentes étapes n’ont pas réussi, du moins jusqu’ici, malgré des efforts certains (notamment dans les années 1990), à déboucher sur une paix durable et une réconciliation définitive.

D’où mon interrogation : pourquoi la relation de confiance - laquelle constitue le véritable socle d’une nation – entre l’Etat et les populations du Nord, et plus particulièrement parmi les composantes tamasheq et arabe n’a- t-elle pas pu s’établir véritablement jusqu’à présent?

J’entends par là que le problème n’est pas de l’ordre des essences éternelles, qu’il est historiquement daté, que les choses ne sont pas condamnées à en rester là et qu’à ce titre, la situation peut être surmontée si le diagnostic est correct et s’il débouche sur des démarches adéquates.

Une observation déjà ancienne, et confirmée lors des dernières rencontres organisées par le Centre pour le Dialogue Humanitaire (HD), apporte une justification supplémentaire de poids à cette investigation : malgré les différences d’intérêts, malgré les séparations géographiques liées à deux exodes successifs en deux décennies, malgré les dégâts causés par les bandes armées et les milices communautaires, malgré les actes délictueux commis par certains individus, malgré les déchirures, il n’y a pas eu jusqu’à présent de rupture radicale entre communautés sédentaires et nomades des régions du Nord. La cohabitation ancestrale qui les caractérise fait dire aux uns et aux autres que la paix et la sécurité passent par le retour aux relations de bon voisinage. Le maintien de cette diversité est le gage de la paix sociale à venir. Plus encore, ceux qui ont fréquenté le Nord peuvent dresser une remarque similaire concernant les rapports entre gens du Nord et gens du Sud entre lesquels il n’existe pas de véritable antagonisme. La qualité de l’hospitalité et une certaine mixité en témoignent. Les problèmes de fond ne sont pas à ce niveau.

Le tissu social a certes été atteint par les divers accidents de l’histoire qui l’ont affecté, mais il peut être recousu, comme cela a été démontré dans les années 90. Le principal problème, à mon avis, demeure dans le fait que la confiance entre l’Etat et les composantes d’où ont émané les rébellions n’a pas encore réussi à prendre suffisamment corps. Mon hypothèse est que cela est dû à une succession de ratés qu’il importe de cerner au mieux afin de ne plus les reproduire. L’enjeu en vaut la peine car le pays et tous ses citoyens du Nord et du Sud ne peuvent plus se permettre de porter un tel fardeau de crises catastrophiques à répétition.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, je pense utile de dire à partir de quoi je parle. Mon expérience avec le Mali a commencé il y a plus de 40 ans avec des cours d’alphabétisation à Montreuil. En 1975, je me suis retrouvé coopérant IRAM (Institut de Recherches et d’Applications des Méthodes de développement) dans un programme de relance des coopératives à Gao, chef - lieu régional à l’époque de tout le Nord (à l’exception de Niafunké) ce qui m’a permis de découvrir la richesse humaine et la diversité remarquable des milieux, dans un contexte à l’époque de totale sécurité. Par la suite, je me suis retrouvé souvent au Mali à l’occasion de missions dans les domaines du développement, de la consolidation de la paix et de la décentralisation. Et depuis octobre dernier, j’ai eu l’occasion de participer à plusieurs rencontres organisées par HD dans les pays voisins.

Dans le plan adopté, je cherche à voir comment la problématique de la construction de la nation a évolué dans le temps. Une première partie sera consacrée à l’héritage laissé par l’Etat colonial au moment de l’Indépendance. La deuxième passera en revue l’évolution de la question de 1960 à nos jours en distinguant trois grandes périodes correspondant globalement aux différentes Républiques qui se sont succédées. Pour éviter un trop long exposé et parce qu’elle est mieux connue, j’ai cru utile de synthétiser en un même ensemble la dernière phase qui commence dans les années 90 et qui s’étale jusqu’à nos jours. Ce faisant, j’ai pleinement conscience de ne proposer qu’une ébauche ; laquelle, sans aucun doute, mériterait de bien plus amples développements.

LE LEGS DE LA PERIODE COLONIALE

Manifestement le principal héritage a été l’Etat lui-même avec une organisation administrative et un fonctionnement calqués sur le modèle français, à l’intérieur de frontières internationalement reconnues. Le changement de dénomination (le Mali succédant au Soudan Français) exprimait une volonté explicite de se référer à l’empire du Mali des 13e et 14e siècles, comme la Gold Coast l’avait fait peu auparavant avec l’ancien Ghana. Quant à la construction de la nation, du vouloir vivre ensemble, cela n’avait pas été la préoccupation du pouvoir colonial dont la finalité était seulement de contrôler de vastes territoires, conformément aux intérêts de la métropole suivant les découpages concoctés à la fin du XIXème siècle dans le cadre des rivalités entre puissances européennes.

Cette construction de la nation était plus facile à réaliser au Sud qu’au Nord. Le potentiel démographique et économique y était beaucoup plus grand. L’Office du Niger et le développement agricole et urbain étaient déjà lancés. L’unité culturelle était plus évidente. La vie politique depuis 1946 s’y trouvait beaucoup plus animée. Aux yeux du colon, c’était « le Mali utile », une expression qui va persister dans le monde des grands décideurs jusque dans les années 1980. Le Nord, de son côté, était desservi par son climat, son étendue, sa faible densité de population et les limites de ses infrastructures et de son tissu urbain. Son potentiel économique paraissait très restreint et les coûts d’encadrement élevés.

Si on remonte plus loin en arrière, en raisonnant sur la longue histoire des échanges transsahariens qui, pendant des siècles, ont structuré l’espace compris entre la savane et le Maghreb, le Sud du Mali se trouvait dans la bande géographique occidentale allant du Maroc à la forêt guinéenne et ivoirienne alors que le Nord s’inscrivait davantage dans l’axe plus oriental reliant l’Algérie au Nigéria et au pays mossi. Les échanges commerciaux et donc les contacts restaient relativement limités entre les deux ensembles. C’est dire que le Nord et le Sud ne se connaissaient pas bien, si ce n’est à travers l’actuelle région de Mopti qui servait de tampon entre les deux comme dans une chaîne de sociétés. Je me suis laissé dire que pendant longtemps les habitants de Bamako n’avaient pas de mot spécifique pour désigner les Touaregs et qu’ils utilisaient pour ce faire le vocable servant à nommer les Maures du Sahel Occidental et de Mauritanie avec lesquels ils étaient beaucoup plus en contact.

Au moment de l’Indépendance donc, à l’exception de quelques corps de métiers (tirailleurs, fonctionnaires, commerçants, etc.), la connaissance réciproque était peu développée. Elle l’était davantage avec le monde songhay qu’avec le monde arabo-berbère. Le premier avait plus de cadres et était plus investi dans les partis politiques. L’exode déjà ancien vers le Ghana lui avait ouvert les yeux sur les évolutions en cours.

En plus de cela, le colon avait largement maté et réduit l’influence des nomades, ce qui ne pouvait alimenter chez eux qu’un sentiment de méfiance vis-à-vis de l’Etat. La résistance principale à la conquête dans toute la Boucle du Niger, de Niafunke jusqu’à Ménaka, ça avait été surtout eux. Ils avaient subi la répression militaire au plus haut degré, même si nombre de victimes s’étaient retrouvées aussi parmi leurs alliés arma, songhay et peul.

Autre point, au Soudan Français comme dans d’autres colonies, la politique à l’égard des populations pastorales a souffert d’un manque de compréhension des logiques et des pratiques spécifiques à ces milieux. La priorité accordée au contrôle plutôt qu’au développement des potentialités en place a conduit à adopter des mesures lourdes de conséquences : division administrative et territoriale des sédentaires et des nomades, affaiblissement politique de ces derniers (amorce de leur émiettement), affirmation très nette de la préférence agricole sur l’élevage pastoral, etc. Au vu de l’échec de la politique de sédentarisation un moment envisagée, le pouvoir a cherché à limiter et à contrôler la transhumance des troupeaux. L’intérêt pour la scolarisation des enfants d’éleveurs s’est avéré très tardif avec un impact très réduit. Quant à l’intégration dans les forces de sécurité, elle est restée également extrêmement ténue.

Par rapport au chantier de la nation à construire, l’Etat colonial laissait donc derrière lui des déséquilibres profonds entre le Sud et le Nord, mais aussi au Nord entre les populations. Les nomades étaient en fait peu préparés à jouer un rôle constructif dans un monde qui se transformait largement sans eux et qu’ils comprenaient mal. L’Indépendance pour eux, c’était avant tout le départ d’étrangers lointains qui étaient venus, qui avaient frappé et géré à leur manière et qui repartaient. L’intelligentsia ouverte sur la modernité et les nouveaux enjeux était en fait très embryonnaire parmi eux à l’époque.

Le malheur réside dans le fait que non seulement ils n’étaient pas suffisamment préparés, mais deux initiatives venaient d’être prises qui allaient encore davantage compliquer leur positionnement par rapport au nouvel Etat et à la future nation. Ce fut l’OCRS (Organisation Commune des Régions Sahariennes) et la pétition organisée par le cadi de Tombouctou, Mohammed Mahmoud ould Cheikh. La première fut en fait refusée par la plupart des chefs traditionnels de l’époque. Quant à la seconde, elle fut signée par un certain nombre de nomades mais aussi de sédentaires avec lesquels le cadi était en contact et n’est pas sans lien avec les luttes entre les deux partis d’alors (Parti Soudanais Progressiste et Union soudanaise – Rassemblement Démocratique Africain). Elle fut aussi sans lendemain. Il n’empêche que ces deux initiatives quasi concomitantes, toutes deux avortées, ont contribué de façon durable à indexer, à stigmatiser le monde nomade et à compliquer son insertion dans le jeu de la construction nationale qui devait s’étendre de Yanfolila à Tessalit, de Kayes à Anderanboukane.

LES RATÉS DE LA CONSTRUCTION DE LA NATION DEPUIS L’INDÉPENDANCE

Après avoir traité de l’héritage laissé par la période coloniale, il nous faut maintenant aborder comment l’Etat malien a évolué dans le développement du ciment national avec les composantes du Nord restées jusque-là marginalisées.

La Première République

Celle-ci a eu le rôle historique de bâtir le nouveau Mali. Ses dirigeants l’ont fait avec enthousiasme et conviction, dans un contexte acquis aux idées panafricanistes, en créant un socle de valeurs qui se référait à la fois au passé prestigieux de l’épopée mandingue et au socialisme du bloc de l’Est, tout en renforçant le centralisme de l’Etat, non seulement au plan politique (parti unique) mais aussi économique (sociétés d’Etat en position de monopole).

Dès 1963 - 64, ils se sont retrouvés à faire face à une révolte en forme de jacquerie dans l’actuelle région de Kidal, laquelle n’était pas sans évoquer l’épisode de la chouannerie pendant la révolution française. Le choix de la répression à outrance l’a stoppée très rapidement tout en laissant s’installer une véritable chape de plomb sur l’ensemble des populations nomades du Nord, leurs sociétés étant taxées de féodales, esclavagistes et réactionnaires.

A cette nouvelle stigmatisation s’ajoutaient les difficultés générales en matière d’approvisionnement (en céréales surtout) avec les tracasseries de la police économique.

Quant à la vie politique du parti unique (l’US-RDA), les nomades y occupaient peu de place. A un moment même, les postes de députés des circonscriptions où ils étaient majoritaires étaient occupés par des responsables extérieurs au milieu.

Conséquence de tout cela: les défaillances soulignées plus haut de l’héritage colonial en matière de construction de la nation avec toutes les composantes du Nord n’ont pas été relevées pendant cette période clé du lancement du nouvel Etat. On peut même dire que le climat de méfiance s’est renforcé. Ce nouveau raté de l’histoire ne pouvait que peser lourd par la suite.

Il faut cependant souligner que des efforts ont été déployés à cette époque dans le domaine de la scolarisation susceptible de préparer une génération plus importante de cadres.

La période militaire

Avec le coup d’Etat de novembre 1968 et l’installation du CMLN (Comité Militaire de Libération Nationale), les difficultés de celui-ci à trancher sur les grandes options ont entraîné un véritable marasme économique. Au Nord, celui-ci a été amplifié par deux grandes sécheresses (1972-74 et 1982-84). La solidarité nationale, surtout lors de la première sécheresse, a fait défaut au point que l’aide internationale a été détournée pour financer les fameuses « villas de la sécheresse » à Bamako. Cela s’est traduit par des pertes en vies humaines, des hécatombes de cheptel et un appauvrissement généralisé des villages et campements, sans compter l’exode vers les pays côtiers ou encore vers l’Algérie et la Libye.

Il faut cependant noter qu’au lendemain de cette calamité, les ONG et projets ont pu commencer à œuvrer au Nord auprès des différents milieux socio-professionnels, ce qui représentait à l’époque une ouverture certaine.

De même, c’est en 79, avec le démarrage du parti unique UDPM (Union Démocratique du Peuple Malien), que les nomades ont eu des représentants et des députés, ce qui a été vécu à l’époque parmi eux comme une véritable détente. À ce moment, les opérateurs de développement ont également été autorisés à travailler dans la région de Kidal restée fermée jusque là aux étrangers.

Cette ouverture restait cependant limitée en raison de la perpétuation du système administratif dit « de commandement ». Les chefs d’arrondissement étaient toujours appelés « mon commandant » dans la lignée directe du fameux adage colonial : « Je commande, on m’obéit ».

En même temps, les pressions du Fonds Monétaire International et de la Banque Mondiale incitaient l’Etat à se désengager de nombreuses fonctions économiques qu’il continuait malgré tout à assumer. Les services sociaux de la santé et de l’éducation, les plus visibles et les plus appréciés au niveau local, sont ainsi entrés dans une longue crise, les fonctionnaires mal payés ont été incités à quitter la fonction publique et les privatisations ont stimulé le phénomène de la corruption. L’Etat en est sorti très affaibli et la vie politique à bout de souffle alors que la rébellion se préparait en Libye et que le mouvement démocratique s’esquissait, le cumul des deux finissant par déboucher sur le renversement du régime en mars 1991.

Au Nord, en milieu nomade, même si le bilan restait mitigé, cette période a permis à l’Etat d’avoir des personnalités partenaires qui, par la suite, ont servir de trait d’union dans la recherche de solutions à la rébellion des années 90.

Depuis les années 90

Tout ce qui s’est passé durant ces deux dernières décennies est, je pense, beaucoup mieux connu et il serait trop long dans le cadre de cet exposé d’entrer dans le détail des péripéties et des stratégies déployées. Aussi, je vais me concentrer sur les points qui me paraissent les plus à même d’illustrer l’évolution de la thématique retenue.

Pour commencer, il convient de dire ceci au sujet des années 90 : autant la crise est apparue plus grave que jamais auparavant du fait, d’une part, des attaques portées contre les symboles de l’Etat suivies des représailles de l’armée et, d’autre part, des déchirures intervenues dans le tissu intercommunautaire du Nord, autant il n’y avait jamais eu de tels efforts pour surmonter la situation. D’un côté, des accords ont pu être passés entre les belligérants, permettant de diminuer les tensions et d’envisager que des solutions deviennent possibles. D’un autre, l’apaisement et l’espoir d’une réconciliation au Nord ont pu être obtenus grâce à la conjonction de plusieurs phénomènes : la tenue de nombreuses rencontres intercommunautaires, la volonté politique manifeste d’aller vers un nouveau mode de gouvernance (la décentralisation qui constituait la véritable réponse politique à la rébellion), l’appui résolu des financiers à partir de la table ronde de Tombouctou (en juillet 1995) et la proclamation solennelle de l’auto-dissolution des divers mouvements armés, à l’occasion de la cérémonie de la Flamme de la paix (en mars 1996).

Etant impliqué à l’époque dans ce processus d’ensemble, il me semblait que le Mali était désormais sur la bonne voie et cet avis m’apparaissait largement partagé.

Cependant, après quelques années d’espoir, peu à peu, les faits montrant que la situation n’évoluait plus comme souhaité et que de plus en plus de facteurs internes et surtout externes venaient brouiller le champ des perspectives ouvertes récemment et complexifier dangereusement la situation, se sont accumulés. Je les énumère rapidement :

  • d’abord la persistance d’un banditisme, qualifié au début de résiduel, mais qui s’est amplifié par la suite à cause du climat d’impunité et de complicité. En 2011, les esprits étaient véritablement exaspérés devant le laxisme de l’Etat : les bandits livrés aux forces de sécurité et à la justice étaient vite libérés, moyennant paiement, et ainsi encouragés à recommencer et à narguer leurs victimes.
  • Autre élément, la prolifération des armes de guerre et leur commerce.
  • La montée en puissance des trafics illicites : cigarettes, drogue, migrants africains cherchant à se rendre en Afrique du Nord puis en Europe, otages européens...
  • Les visées devenues évidentes vis-à-vis des richesses du sous-sol avec l’octroi souvent opaque de nombreux permis de recherche dans le domaine des hydrocarbures et des gisements miniers.
  • La montée d’une islamisation beaucoup plus visible qu’auparavant des comportements et des esprits avec, entre autres, le développement des foyers wahhabites et, à Kidal, l’introduction avec succès (du moins au démarrage) du Tabligh, d’origine indo-pakistanaise.
  • L’arrivée et l’établissement de djihadistes du GSPC (issu du GIA) puis d’AQMI. Au départ, peu visibles, ils sont arrivés à s’implanter dans certains milieux (à la faveur de cadeaux, de dépannages, de mariages mais aussi de complicités). Ils sont parvenus à sanctuariser leurs bases tout en opérant leurs prises d’otages d’abord à l’extérieur du Mali et en s’acoquinant aux narco-trafiquants avant de finir par s’en prendre aux intérêts du pays lui-même.
  • Dernier élément : le retour d’actes de rébellion à nouveau à partir de la région de Kidal avec les attaques du 23 mai 2006. L’accord vite signé du 4 juillet suivant n’a pas vraiment résolu le problème. Au contraire, les tensions se sont se perpétuées et les diverses initiatives prises par la suite ne sont pas parvenues à stopper la nouvelle spirale qui va évoluer désormais vers le pire, notamment avec le retour d’hommes surarmés à la faveur de l’ouverture des arsenaux de Kadhafi suite à l’intervention occidentale de 2011. La suite est connue avec le déclenchement des hostilités le 17 janvier 2012.
De cette longue période qu’encadrent deux rébellions, la dernière étant beaucoup plus complexe et grave que la première, il convient de relever tout ce qui est destructeur du vouloir vivre ensemble, lequel devrait être le véritable ciment de la nation malienne.

Je relève six éléments à ce propos :

  • D’abord, la propension à verser dans les amalgames entre l’individu présumé coupable et sa communauté d’appartenance. C’est le cas lorsque, au lieu de combattre les seuls belligérants rebelles, les forces de sécurité s’en prennent aux civils (dont beaucoup n’ont rien à voir avec les hostilités) sous forme de représailles ou d’exactions, souvent au faciès des gens. Chaque fois, ce type de dérapage complique la situation et renforce l’argumentation des rebelles. C’est aussi ce qui engendre des flux énormes de réfugiés et de déplacés.
  • Le recours plusieurs fois répété aux milices ethniques ou claniques ne peut que retarder une solution durable mutuellement acceptée. Il affaiblit l’Etat car il contribue à le décrédibiliser. De plus, il instille la violence entre les communautés avec des risques de dérive souvent imprévisibles. Tous les observateurs de conflits intra-nationaux, en Afrique ou ailleurs, s’accordent sur le caractère contre- productif de tels soutiens.
  • Alors que le Pacte National avait prévu une enquête sur les crimes de sang, la loi d’amnistie de 1997 a donné l’impression de vouloir passer l’éponge et de faciliter la tâche à court terme, mais cela a empêché l’établissement de divers actes de violence et la reconnaissance des victimes innocentes. Le conflit ayant repris depuis avec une ampleur inégalée, il ne pourra plus y avoir de réconciliation durable, de part et d’autre, si la vérité n’est toujours pas dite et si la justice n’est pas prononcée de façon impartiale.
  • Autre élément, l’ « argent roi » est devenu au cours de ces années la valeur suprême pour beaucoup. Ceci a entraîné l’affairisme, la corruption, les détournements et pour finir le désordre et l’instabilité. Avec l’argent, les plus puissants ont pensé que tout pouvait s’acheter : les marchés publics, les élections, l’impunité, la paix elle-même en distribuant des pactoles à ceux qui avaient le plus de capacité de nuisance, avec le risque évident de provoquer de véritables frustrations.
  • La décentralisation elle-même a fini par être dévoyée. Avec les années, non seulement le transfert des compétences et des ressources correspondantes n’a guère progressé, mais on a assisté à une recentralisation dans les mains de l’administration. Alors que, dans les zones les plus reculées, l’administration n’est pas revenue s’installer à plein temps dans ses postes pourtant refaits à neuf ; elle a géré à distance à partir des chefs-lieux et a incité les maires à la rejoindre. De leur côté, les appuis techniques ont fini par disparaître pendant que les compétences locales n’étaient pas encore assurées.

La gouvernance locale est à réinventer.

  • Il en est de même dans les approches de développement. Certes, beaucoup a été réalisé en matière d’infrastructures, notamment immobilières. Le paysage des chefs-lieux en a été modifié. En revanche, les besoins de base tels que l’éducation, la santé, l’eau sont restés les parents pauvres. L’élevage pastoral, qui constitue la base principale de l’économie au Nord pour les nomades mais aussi pour les sédentaires et même pour certains citadins, n’a pas été vraiment soutenu alors que la sécheresse est revenue en 2009 et en 2011. Les femmes qui assurent la permanence des familles et dont la preuve est faite qu’elles sont capables d’être souvent les meilleures gestionnaires restent encore, pour l’essentiel, en dehors du circuit des décisions. Quant aux jeunes demeurés sans perspectives, les opérations de développement n’ont pas su vraiment les intégrer et les dissuader de se laisser séduire par les sirènes des solutions fallacieuses. De nouveaux modèles de développement s’imposent où l’aide ne sera plus considérée comme une rente externe à capter, le plus souvent contrôlée sinon accaparée par les mieux placés, mais comme un appui adéquat aux dynamiques sociales soucieuses du bien commun.

CONCLUSION

Il n’est guère possible de conclure tant la situation reste brouillée, du moins pour beaucoup de regards extérieurs dont je fais partie. Certes, les djihadistes ont été frappés, les trafics illicites semblent perturbés. Mais la paix n’est pas encore en vue. Le climat de méfiance s’est nettement amplifié et reste prégnant. A quand le retour d’un vrai dialogue capable d’aller à la racine des problèmes, capable d’exprimer le ressenti des différentes parties en présence et de mettre au point des solutions partagées et cette fois-ci durables ?

Il serait dommage que les leçons du passé – ce que j’ai appelé les ratés de l’histoire – ne soient pas tirées cette fois-ci afin de mettre fin au cycle infernal des conflits qui se perpétuent depuis si longtemps. La preuve toutefois a été faite dans le passé que les forces citoyennes du pays sont capables à un moment donné d’inverser la vapeur et de mettre la raison commune au-dessus des passions partisanes. Espérons que ce sera le cas prochainement. L’enjeu reste bien toujours de construire une véritable nation dans laquelle l’unité saura s’enrichir de la diversité.

Pour leur part, les quelques rencontres réalisées dans les pays voisins du Mali, avec l’appui de HD, confirment que les participants, malgré et à cause de leurs différences, éprouvent bel et bien le besoin de se revoir et de parler ensemble, même si les solutions durables ne sont pas encore tracées et restent à construire.

L’emploi de l’adjectif « inachevée » ne s’applique bien sûr pas seulement au Mali. En fait, le chantier de la construction du vivre ensemble national est universel et n’est jamais terminé, y compris dans un pays comme la France qui éprouve des difficultés notoires, entre autres, avec certaines zones urbaines sensibles. Dans le cas malien, la notion prend une densité particulière avec la problématique des Régions du Nord qui dure depuis longtemps et qui concerne au moins les deux tiers de la superficie du territoire national. Avec les derniers événements, elle s’est même étendue à la partie septentrionale des Régions de Mopti et de Ségou, en plus de la triade bien connue (Tombouctou, Gao et Kidal).

vendredi 5 juillet 2013

Déclaration de N'Djaména sur la contribution de l'élevage pastoral à la sécurité et au développement des espaces saharo-sahéliens



N’Djaména – 29 mai 2013

De la Mauritanie à la Somalie, les grands espaces saharo-sahéliens partagés avec l’Afrique du Nord offrent des conditions difficiles que seule la pratique de l’élevage mobile permet d’exploiter. Cette capacité d’adaptation a constitué de tous temps un précieux atout pour les éleveurs qui font vivre leurs familles et approvisionnent leurs pays en viande, ainsi que les pays voisins du Sud comme du Nord.

Les éleveurs fournissent une grande richesse aux pays dont ils sont citoyens, contribuant largement au PIB, aux ressources fiscales et aux exportations. Les éleveurs-pasteurs ont des modes de vie et des savoir-faire les mieux à même de s’adapter à l’environnement saharo-sahélien et de vivifier cet espace. Atout majeur pour les pays saharo-sahéliens, l’élevage est aussi un puissant vecteur d’intégration économique régionale par le commerce florissant qu’il génère.

Cependant, les capacités de résilience des sociétés pastorales sont mises à l’épreuve par des chocs climatiques récurrents et leurs conséquences environnementales, économiques, sociales et politiques. En outre, depuis une décennie, un nouveau fléau s’est abattu sur elles. Les espaces qu’elles occupent et font vivre sont en proie à une insécurité chronique, mouvante et transfrontalière. Nourrissant et se nourrissant de trafics illicites, de nombreux groupes mafieux et terroristes déstabilisent l’ensemble de la région, inquiètent le monde et menacent de transformer le Sahel et le Sahara en une vaste zone grise.

Or l'élevage pastoral est un vecteur remarquable de structuration des territoires. La mobilité permet en effet d'assurer une présence régulière dans des zones vides de population résidentes et limite la tendance à la création de "No Man's Land" incontrôlés.

Face à cette menace, à l’initiative du Président de la République du Tchad, son Excellence Idriss DEBY ITNO, les représentants de nombreux pays africains, à savoir les Ministres en charge de l’Elevage et de la Sécurité, les représentants des organisations socioprofessionnelles et intergouvernementales, les experts du secteur et les partenaires au développement se sont réunis à N’Djaména du 27 au 29 mai 2013 pour réfléchir à la contribution de l’élevage pastoral à la sécurité et au développement des espaces saharo-sahéliens. A l’issue de la conférence des Ministres, ils ont adopté la déclaration qui suit :

  • CONSIDERANT que l’avenir des espaces saharo-sahéliens ne peut être conçu sans l’élevage pastoral et ses fonctions irremplaçables de développement économique, social et de gestion de l’environnement et du territoire.
  • CONSIDERANT que ce mode de vie repose sur la mobilité des troupeaux et des familles et leur accès à l’eau, conditions indispensables pour bénéficier des pâturages immenses dont la localisation varie chaque année selon les aléas climatiques.
  • CONSIDERANT que cette mobilité doit être négociée avec les autres usagers de l’espace, en particulier ceux des zones méridionales où les troupeaux trouvent des ressources en saison sèche.
  • CONSIDERANT que la cohabitation, le brassage culturel et la tolérance mutuelle sont des valeurs d’avenir, entre éleveurs tout comme entre les éleveurs et les autres groupes sociaux.
  • CONSIDERANT la volonté politique des Hautes Autorités de la région d’apporter des solutions idoines pour le développement durable et pour l’éradication de l’insécurité des espaces saharo-sahéliens.

  • LES PARTICIPANTS AFFIRMENT LEUR CONVICTION QUE :




  • L’activité d’élevage va de pair avec la sécurité. Etats et éleveurs doivent travailler ensemble. Dans des espaces saharo-sahéliens où la sécurité est gravement menacée, la relation entre la mobilité des troupeaux et la sécurité fonctionne dans les deux sens. L’élevage pastoral et le commerce étant l’une des principales occupations humaines légales et pacifiques des zones concernés, ils y constituent une ligne de défense essentielle contre l’insécurité par l’occupation de l’espace.
  • La réponse à la demande croissante en produits de l’élevage nécessite à la fois la promotion de l’élevage pastoral transhumant et la recherche d’une bonne articulation avec les différentes formes d’élevage sédentaire qui se développent en zone agricole et autour des villes.
  • La mobilité nécessite que les frontières nationales ne soient pas des barrières à la circulation des troupeaux ou des productions animales.
  • Le savoir faire des sociétés d’éleveurs doit se perpétuer tout en absorbant les progrès techniques disponibles dans la conduite de l’élevage (alimentation et santé animale notamment) et dans d’autres domaines (transport, téléphonie, finance). L’information et la formation des éleveurs sont donc cruciales.
  • Les hommes et les femmes engagés dans l’activité d’élevage mobile doivent bénéficier d’un accès équitable aux services de base (éducation, santé, eau, nutrition), au droit, et à la représentation aux différents échelons de la vie publique.


    Sur ces bases, la conférence régionale de N’Djaména invite les Etats de la région et les partenaires au développement à :
    • Placer l’élevage pastoral au cœur des stratégies de stabilisation et de développement à court, moyen et long terme des espaces saharo-sahéliens
    • Définir et mettre en œuvre des politiques volontaristes et cohérentes d’amélioration de la gouvernance, de renforcement de la résilience et d’amélioration de la viabilité économique et sociale des systèmes d’activités des espaces saharo-sahéliens.

    Par conséquent, la conférence formule les recommandations suivantes :


    AMELIORER LA GOUVERNANCE 


    Les politiques publiques gagneront à impliquer plus directement les sociétés pastorales dans les mécanismes de gouvernance locale, nationale et internationale, sur la base de la subsidiarité. Les lignes d’action devraient être les suivantes :

    • Redynamiser des politiques de décentralisation inclusives intégrant pleinement les sociétés nomades, avec leurs groupes mobiles et sédentaires, à la gouvernance des espaces et de la vie publique ;
    • Donner à l’élevage la place qu’il mérite dans l’aménagement du territoire et dans les plans de développement.
    • Etablir et mettre en œuvre des mécanismes concertés et transparents de taxation sur les filières de commercialisation des produits de l’élevage (fiscalité équitable et réinvestissement budgétaire public à hauteur des enjeux) ;
    • Valoriser les activités professionnelles, sociales et sociétales spécifiques des jeunes et des femmes éleveurs des espaces saharo-sahéliens par la création d’emplois socialement et économiquement reconnus, en facilitant l’accès à des services d’éducation et de santé ;
    • Favoriser la création et le développement d’organisations pastorales légitimes, capables de participer à la bonne gouvernance, à la défense des droits et des intérêts des pasteurs (hommes et femmes), à une meilleure diffusion et application des textes législatifs liés à la gestion durable des ressources et du foncier pastoral et à la reconnaissance de leur spécificité ;
    • Renforcer la coopération inter-états afin de faciliter la circulation transfrontalière pour promouvoir les échanges régionaux ;
    • Encourager le développement d’un partenariat international à travers la mise en place d’une plateforme multi-institutionnelle et multi-acteurs de suivi et de plaidoyer sur le pastoralisme
    • S’appuyer sur les leçons apprises de la gestion et de la conception des projets pour définir des montages plus performants et plus adaptés au contexte pastoral. 


    RENFORCER LA RESILIENCE DES SOCIETES PASTORALES


    Les politiques investiront dans la prévention des risques climatiques, politiques, économiques et sociaux et dans la sécurisation de la mobilité pastorale, en veillant à :

    • Sécuriser la mobilité et les espaces pastoraux et améliorer l’accès aux ressources naturelles (eau, pâturages); ceci passant par la négociation d’accords sociaux légalisés permettant l’adaptation des pasteurs au changement climatique et la conservation de la biodiversité ;
    • Développer des mesures structurelles de soutien à la résilience et à la reconstitution de l’économie pastorale par des appuis d’urgence ciblés, la production structurelle d’aliments du bétail, la protection du capital génétique des races locales, la reconstitution des troupeaux au sortir des crises et le renforcement des services de santé animale indispensables ;
    • Mener une réflexion de haut niveau entre pouvoirs publics, partenaires au développement et utilisateurs sur le financement et l’entretien des infrastructures d’hydraulique pastorale afin de pérenniser le patrimoine existant ;
    • Sécuriser les échanges transfrontaliers, supprimer les prélèvements illicites et réduire les risques de vols et de prédation au passage des frontières ;
    • Expérimenter des systèmes d’assurances sociales et sur le bétail en veilla nt à l’intégration des risques en élevage dans la plateforme pour la gestion des risques agricoles (PARM) ;
    • Renforcer le dialogue entre la recherche appliquée et les organisations pastorales afin d’améliorer les connaissances sur les dynamiques, la productivité et la rentabilité des systèmes d’élevage pastoraux ;
    • Renforcer les échanges d’expérience et la cohérence des actions entre les pays des zones sahariennes, sahéliennes et soudaniennes.


    RENFORCER LA VIABILITE ECONOMIQUE DES ACTIVITES D’ELEVAGE PASTORAL


    Les politiques viseront à :

    • Encourager la mise en valeur des produits pastoraux au profit de l’emploi des jeunes et des femmes pasteurs et des populations locales ;
    • Mieux articuler, aménager et sécuriser les axes de transhumance et les axes de commercialisation du bétail, notamment par l’amélioration des infrastructures de marché ;
    • Encourager l’investissement privé dans la production, la distribution d’aliments du bétail, la transformation des produits animaux (produits laitiers notamment) et l’approvisionnement en intrants zootechniques et vétérinaires ;
    • Renforcer les capacités des organisations professionnelles de l’élevage dans la dans la gestion des marchés à bétail (négociation, défense des droits, suivi de la gestion des marchés et de la fiscalité locale) ;
    • Adopter et appliquer des mesures de commerce extérieur, notamment des tarifs communs, favorisant le développement des filières régionales vis-à-vis des importations du marché mondial ;
    • Faciliter l’exploitation des moyens modernes de communication (transport, téléphonie, internet) et d’accès aux services bancaires; explorer les possibilités d’une couverture réseau sur l’ensemble des territoires des Etats ;
    • Mettre en place des dispositifs permanents de suivi technico-économique des principaux types d’élevage impliquant la recherche et les universités de manière à renforcer les connaissances scientifiques sur l’élevage pastoral.

    RENFORCER LA VIABILITE SOCIALE DES POPULATIONS DES ESPACES SAHARO-SAHELIENS


    Les politiques auront pour objectif de :

    • Améliorer l’accès des pasteurs aux services publics de santé animale et humaine en poursuivant les innovations dans le jumelage des deux services ;
    • Intensifier la recherche d’innovations dans les politiques publiques d’éducation de base et de formation professionnelle des jeunes des espaces saharo-sahéliens ;
    • Renforcer les liens intercommunautaires par les politiques de gouvernance, de culture et de gestion des ressources partagées ;
    • Renforcer les capacités de la société civile, à participer à l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi des politiques publiques.
    Les participants soulignent la nécessité de poursuivre la réflexion et le dialogue sur l’avenir des espaces saharo-sahéliens dont la stabilité et le développement conditionnent en grande partie l’avenir de l’Afrique de l’Ouest, du Centre, de l’Est et du Nord. Ils insistent sur le fait que le développement durable des espaces pastoraux et la résilience des pasteurs face à l’insécurité alimentaire chronique doivent être au cœur des stratégies à long terme en la matière et bénéficier de politiques publiques plus intégrées, coordonnées régionalement pour être en phase avec les réalités transnationales, donc plus efficaces.

    LA CONFERENCE REGIONALE DE NDJAMENA APPELLE la communauté sahélienne, ouest-africaine, centre africaine, nord-africaine et internationale, à s’unir dans un esprit de paix, de tolérance et de partage pour construire ensemble la paix et le développement des espaces saharo-sahéliens en valorisant le pastoralisme, seul à même d’en entretenir la stabilité.

    Plus spécifiquement ils invitent :

    • Le pays hôte de la conférence, la République du Tchad, à travers ses plus hautes Autorités – en particulier de son Président de la République, chef de l’Etat, Son Excellence Idriss DEBY ITNO – à porter cet appel au sein des instances appropriées, institutions régionales, pays frères et conférences internationales à venir, notamment la conférence annoncée sur la sécurité du Sahel à Paris en décembre 2013 ;
    • Les organisations et associations d’éleveurs à poursuivre et renforcer leur structuration à l’échelle nationale, sous-régionale et régionale ; ceci afin d’améliorer la conception, la mise en œuvre et le suivi des politiques publiques. Ils les invitent également à renforcer la qualité des services à leurs membres et par conséquent leur ancrage local
    • Les organisations régionales à formuler une stratégie régionale à long terme de stabilité et de développement des espaces saharo-sahéliens, sur la base d’un dialogue approfondi avec toutes les parties prenantes, y compris l’ensemble des acteurs concernés par le pastoralisme.
    • Les Etats de la CEDEAO, de l’UEMOA et du CILSS engagés dans l’Alliance Globale pour la Résilience (AGIR) – Sahel et Afrique de l’Ouest et du Centre, à mener des dialogues inclusifs nationaux sur la résilience incluant les atouts du pastoralisme pour la paix et la sécurité. Sur cette base, à se doter de priorités nationales « Résilience » correspondant aux stratégies et politiques des pays et aux engagements budgétaires de l’Etat pour l’investissement sur la résilience.
    • Les partenaires techniques et financiers d’AGIR, à apporter leur appui pour la mise en œuvre des priorités nationales « Résilience », de façon harmonisée et alignée, en complémentarité avec les budgets des Etats.
    • Les Etats de la CEEAC, de la CEMAC et de l’UMA à s’engager dans la formulation d’initiatives résilience du même type. Et à la communauté internationale de les appuyer dans cette démarche ;
    • Les Etats membres de l’UA à s’engager dans la mise en œuvre de l’initiative rural futures du NEPAD
    • Le Club du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest à poursuivre l’animation de la réflexion sur l’avenir des espaces saharo-sahéliens et à favoriser l’indispensable dialogue entre l’Afrique de l’Ouest, du Centre et du Nord.

    La Conférence Régionale



    vendredi 24 mai 2013

    Colloque : Quelle nouvelle gouvernance pour le Mali?


    Essai de synthèse de la journée du 16 mai 2013 à l’Assemblée Nationale(1)

    Quelle nouvelle gouvernance pour le Mali ?
    Organisé par le Centre for Humanitarian Dialogue

    Le Centre for Humanitarian Dialogue a rassemblé une centaine de participants, le jeudi 16 mai 2013, afin d’échanger sur les questions centrales dans le règlement de la crise au Mali. Cette journée fut l’occasion de réunir des intervenants de divers horizons, dont des maliens du Nord et du Sud, certains étant réfugiés en Mauritanie. 

    En voici le programme :



    « Il n’y a pas de sécurité sans développement, il n’y a pas de développement sans sécurité, et il n’y a pas de développement et de sécurité sans nouvelle gouvernance.(2)  »

    Au regard de ces mots introductifs prononcés lors de l’ouverture du colloque par François Loncle, Vice-Président du Groupe Sahel et membre de la Commission des Affaires Etrangères à l’Assemblée Nationale, des pistes ont été cherchées par tous les participants à cette réunion afin de définir les orientations d’une nouvelle gouvernance destinée à impulser le développement et à assurer la sécurité au Mali.
    Ainsi, l’objectif du colloque était d’apporter les clefs de lecture à la crise du Mali pour en chercher la sortie grâce à la construction d’une nouvelle gouvernance malienne.

    Lors de ce colloque, les débats ont tantôt divisé tantôt concilié les participants. Ainsi, cette synthèse s’organisera en présentant en premier lieu les points sur lesquels tous semblent s’accorder, pour ensuite aborder les éléments plus polémiques.


    I. Un bilan globalement unanime


    Malgré les conflits à répétition que connaît le Mali, un aspect positif se dessine, celui d’une reconstruction possible : il y a toujours du bon à prendre dans une crise.
    Si des rencontres et espaces de discussion sont actuellement mis en place c’est parce qu’on constate que depuis 1960, date de l’indépendance du Mali, les crises politiques et sécuritaires se sont répétées au Nord du Mali en s’aggravant toujours plus. Les solutions trouvées à chaque nouvelle crise n’ont pas sues construire une paix et une réconciliation durable. Cependant, il y a un espoir de résolution de ces crises si certaines conditions sont établies. Le climat conflictuel au Mali est daté, et il n’est pas historiquement éternel, ce qui suppose qu’une paix durable peut s’établir au Mali. Effectivement, malgré tous les problèmes que recense le Mali, il n’y a pas eu de rupture entre les nomades et les sédentaires, et à voir l’hospitalité entre les populations du Nord et du Sud, il n’y a pas de véritable antagonisme. De plus, la crise peut être l’occasion d’un changement profond, notamment par la volonté de prendre en compte les différentes composantes de la société malienne, de comprendre et d’accepter les différences et les complémentarités.

    Le conflit au Mali touche plusieurs Etats.
    C’est d’abord dans le contexte sahélien qu’a germé le conflit malien. Le sahel est depuis toujours, de par sa position géographique, un espace particulier d’échange. Aujourd’hui il est caractérisé par des trafics divers : migrants, armes, drogues, cigarettes. Ainsi les Etats voisins sont aussi impliqués dans les problèmes qui touchent le Mali en tant qu’Etat de transit. De plus le Burkina Faso, la Mauritanie et le Niger, accueillent aujourd’hui de nombreux maliens ayant fuit l’insécurité sur leur sol.
    La France et l’Union Européenne sont aussi concernées à multiples égards par la crise au Mali. Le conflit actuel est ancré dans l’ère coloniale qu’a connu le Mali. Historiquement d’abord, puisque la France, de par son approche utilisée pendant la période coloniale consistant à « diviser pour mieux régner », a influé sur la construction divisée de la société malienne que les Républiques successives du Mali n’ont pas réussi à modifier profondément. De plus, le narco trafic très présent au Mali se destine à l’Europe, principal demandeur sur le marché de la drogue en provenance d’Afrique.

    Un déficit de confiance qui doit se résorber par le dialogue.
    La défiance au Mali se manifeste entre les populations du Nord et du Sud, mais aussi entre les populations du Nord elles-mêmes et entre l’Etat et le Nord. La réconciliation est l’impératif à une possible sortie de crise. Il y a aujourd’hui une volonté de construire le Mali comme un tout grâce au dialogue. Les traumatismes existent, il ne faut pas les nier, mais il faut dépassionner le débat. Cependant des divergences divisent l’opinion quant à la manière d’établir ce débat. Dans cette optique la création de la CDR (Commission pour le Dialogue et la Réconciliation) est généralement bien accueillie. Une importance particulière est donnée à la place de la vérité dans ce dialogue, il faut accepter les réalités et ne pas  se construire autours de faux débats.

    L’argent Roi
    L’argent est devenu la valeur suprême capable de tout acheter : la paix, les élections, les armes… Cette situation entraine affairisme et corruption. Une prise de conscience doit s’opérer pour ne pas voir des comportements de prédations sur l’aide attribuée. Cette responsabilisation peut s’effectuer par l’éducation populaire.

    La construction de l’avenir des jeunes comme alternative aux instabilités propres au Mali.
    Le problème de la démographie pourrait être considéré comme structurellement plus grave que tous les autres énumérés ci-dessus. L’évolution démographique entraine un décalage entre l’offre et la demande de travail, ainsi il n’y a pas assez d’emplois et une pauvreté qui ne cesse de s’accroître. Le Mali possède un des taux de fécondité parmi les plus hauts du monde avec environ 6 enfants par femme et est un des pays les plus pauvres.
    Face à l’augmentation de l’islamisation des comportements et des esprits, la place des jeunes est fondamentale. Ce sont eux qui pourront offrir un avenir stable au Mali. Si ces jeunes, numériquement imposants, n’ont pas de perspective d’avenir, ils peuvent être tentés de rejoindre les rangs des groupes salafistes ou de se diriger vers le trafic des drogues.

    Pour une aide plus cohérente.
    Repenser l’aide au développement est une exigence pour éviter les dangers de la coopération et assurer la cohérence de l’aide. Il ne faut pas offrir des services éclatés ou effectuer des zonages d’intervention. Les « guerres » entre ONG doivent être dépassées pour s’accorder sur les programmes à favoriser.
    Il faut aujourd’hui donner une place significative à l’urgence face aux derniers évènements survenus au Mali, et notamment au climat d’insécurité qui y règne en ce moment. Le retour des réfugiés doit s’organiser dans des brefs délais après le retour au calme.

    Sensibiliser de nouveaux acteurs.
    Une campagne de communication concertée vers l’opinion des français devrait s’organiser pour montrer les impacts des actions réalisées et ainsi mobiliser et gagner la confiance des français.
    De l’autre coté il faut faire participer les bénéficiaires. Seuls les maliens pourront vraiment impulser un retour à une paix durable, c’est à eux qu’incombe la construction du Mali.

    Sur les points exposés ci-dessus la majorité des personnes étant intervenues dans le débat s’accordent. Cependant, force est de constater qu’après avoir posé ce bilan général, les désaccords interviennent quant à la manière d’impulser le changement. On a pu constater lors de ce colloque qu’une première étape a été franchie dans le processus de discussion préalable aux actions de développement : la reconnaissance de la nécessité de poser les causes historiques et économiques qui ont conduit à la situation conflictuelle. C’est le début d’un dialogue construit qui repose sur l’acceptation de la vérité et la réconciliation. Les discussions futures devront nécessairement se pencher sur la manière de mettre en place les processus de développement adéquats.



    II. les polémiques divisant les différents partenaires


    Le renforcement du processus de décentralisation comme clef du développement.
    Depuis la loi de 1992, le processus de décentralisation a été favorablement salué par tous. Cependant la décentralisation est depuis plusieurs années « en panne », on a même vu un élan de recentralisation. Le Nord du Mali constitue 2/3 du territoire, pourtant un sentiment d’abandon perdure. Tout le monde s’accorde à dire que la décentralisation est une des clefs d’administration du territoire pertinente pour promouvoir le développement, cependant le processus de décentralisation n’a pas encore fait toutes ses preuves et il se doit d’être renforcé.
    Pour assurer plus d‘autonomie au collectivités locales, la taxe de développement local doit être rigoureusement établie, notamment quant à son recouvrement, sous peine de voir ces collectivités sans ressource. Il est du devoir des citoyens de payer cette taxe, une prise de conscience sur sa nécessité est donc nécessaire.
    Selon certains participants, le Mali étant parfois perçu comme un « millefeuille administratif », il pourrait être judicieux de se limiter à deux niveaux dans la décentralisation : communes et régions.

    Clivages intercommunautaires et intracommunautaires.
    On peut appréhender la multiplication des groupes rebelles de différentes manières.
    -- Pour certains, c’est à cause de la persistances des problèmes (pauvreté, sous développement, chômage) que beaucoup ont intégré les rangs de l’opposition (MNLA, AQMI, MUJAO…). Selon cette position, il ne faut pas voir ces groupes communautaires, notamment le MNLA comme la source de tous les problèmes. Si ces derniers disparaissaient subitement, les problèmes subsisteraient, c’est pourquoi il faudrait tenter de trouver des réponses plus profondes aux maux qui gangrènent le Mali. Ainsi la formation du MNLA est un symptôme en réponse aux maux plus profonds qui fragilisent le Mali.
    -- Pour d’autres en revanche le MNLA constitue la cause directe de la crise malienne. Ainsi l’anéantissement de ce dernier rétablirait le calme au Mali.

    Tous s’accordent pour dire qu’il y a trop souvent amalgame entre les individus coupables et la communauté dont ils sont issus. Cette confusion a pour conséquence de renforcer les arguments des rebelles et augmente le flux des réfugiés.

    Faut-il changer de vocable pour désigner le Nord Mali ?
    On constate des divisions dans l’opinion sur le vocable à utiliser pour désigner le Nord et le Sud du Mali. Pour certains il faut éviter de parler de Nord et de Sud pour ne pas créer une scission entre deux zones géographiques appartenant au même pays, (le Nord et le Sud Soudan sont donnés comme exemple). Ainsi il faudrait préférer l’expression « septentrion malien ». Pour d’autres, la nature a fait du Nord et du Sud deux parties distinctes. Les conditions, la culture et l’histoire de chacun de ces sous blocs sont indiscutablement différents. Ainsi, comme « il faut appeler un chat un chat(3)  » on devrait, selon cette position, appeler le Nord le Nord.
    Certains disent qu’il faut aussi accepter la réalité : le Mali est effectivement un tout, mais il est vrai qu’il y a un Sud qui administre le Nord. Il y a des différences de développement majeures entre ces deux parties : le Nord est bien moins développé que le Sud. «  Quand on a mal au doigt, certes on a mal, mais on ne dit pas qu’on a mal au corps en général, on dit bien qu’on a mal au doigt ». Cet avis sur le développement plus faible du Nord n’est pas partagé par tous, il est dit également que la Région de Kayes située au Nord Est est également faiblement développée mais que cela n’entraîne pas de prise d’armes par ses habitants. Les Régions du Sud ont plus de potentiel mais ont aussi des problèmes de développement.


    « Personne ne fera la Mali à notre place.(4)  »


    (1) Cette synthèse a été réalisée par l’IRAM, elle reprend certains éléments évoqués lors de la réunion du 16 mai et ne reflète pas l’avis des rédacteurs. Par ailleurs ce document n’a pas fait l’objet d’une demande de validation de la part des participants.
    (2) Présentation de François Loncle pour l’ouverture du colloque

    (3) Propos rapportés de Madame Zakiyatou Oualett Halatine lors du colloque du 16 mai à l’Assemblée Nationale.
    (4) Propos rapportés de Madame Zakiyatou Oualett Halatine lors du colloque du 16 mai à l’Assemblée Nationale.

    lundi 13 mai 2013

    Mali - Pistes pour la sortie de crise



    Les partenaires du Mali se réunissent mardi 15 mai 2013 à Bruxelles pour réfléchir avec le gouvernement malien et des représentants de sa société civile aux pistes de sortie de la crise qui secoue le pays depuis plus d’un an maintenant. Cette réunion est un moment déterminant pour la définition d’une stratégie commune permettant à l’ensemble du pays de renouer avec la paix, la démocratie et le développement.  

    Pour IIED et IRAM, un certain nombre de questions-clés ne devront pas être oubliées au cours de ces réflexions.

    I - Le rétablissement de la confiance


    Le Mali dispose d’un capital social  qui a fait sa force depuis des décennies et lui a permis de passer bien des crises. Aujourd’hui, ce capital est fortement entamé. Le Mali souffre d’un déficit de confiance entre les populations du nord et du sud, entre les différentes communautés du nord et entre l’Etat et les populations du nord. Un climat de confiance doit s’établir pour permettre une paix durable. Ce dernier pourra s'établir par le biais d’un dialogue qui associerait toutes les communautés, et de rencontres intercommunautaires aptes à concrétiser le processus de paix et à amorcer la réflexion sur les questions de développement. Il est important d’appuyer le gouvernement malien dans ce processus qui en plus de la réconciliation et de la paix devra également se baser sur un dialogue effectif permettant aux maliens d’aborder dans un esprit de vérité toutes les questions qui les unissent mais aussi celles qui les divisent.

    La tenue des élections législatives et présidentielles, fondamentales pour le rétablissement du processus démocratique est indispensable. Mais pour que celles-ci puissent véritablement rétablir la confiance et non augmenter la méfiance et le désintérêt pour la chose politique, elles doivent se tenir dans des délais et des conditions qui permettent à toutes les communautés d’y participer effectivement.

    II - Le bilan et le renouvellement du cadre institutionnel


    Malgré la crise actuelle, le Mali n’est pas dépourvu d’institutions. Il existe des institutions en place qu’il est nécessaire de renforcer pour rendre leur fonctionnement effectif au regard des défis à relever. La décentralisation semble constituer, à condition d’être renouvelée et approfondie, un cadre institutionnel adapté à l’expression des initiatives de développement et à la mise en œuvre d’actions publiques répondant aux attentes et aux besoins des citoyens. Cependant, cela suppose, de faire un bilan critique de la décentralisation telle qu’elle a été mise en œuvre jusqu’ici. Il s’agira de revoir  sa capacité à garantir l’équité dans la répartition des services publics, l’accompagnement du développement économique et la gestion des conflits.

    III - Une gouvernance de l’Aide à repenser  


    Il est probable que des montants importants soient dégagés suite à la réunion de Bruxelles pour aider le Mali à relever les défis de la paix et du développement. Il faut cependant garder en mémoire que malgré des succès indéniables,  les actions de développement au Nord en particulier  se caractérisent par un bilan médiocre. Des sommes importantes ont été dépensées sans que des évolutions notables soient impulsées pour l’amélioration de la condition des populations. Les processus de développement doivent nécessairement être pensés différemment et une nouvelle gouvernance de l’aide doit prendre racine. Les flux d’aide doivent être adaptés aux problématiques actuelles tout en s’articulant avec les politiques nationales et les institutions en place. Pour assurer l’utilisation effective de ces flux au profit des populations, des modes de contrôle par la société civile doivent être envisagés. 

    IV - La mise en œuvre d’une démarche visant à définir des actions de développement mieux adaptées


    Il est souhaitable d’engager, dès que les conditions de sécurité le permettront, un processus inclusif de dialogue et de concertation autour des actions de développement économique et social au Sud comme au Nord. En plus des appuis aux cultures irriguées, il est indispensable de donner un accent significatif au Nord à l’appui à la sécurisation de l’élevage mobile. L’élevage est une ressource économique majeure sans laquelle les différentes communautés du Nord ne sauraient assurer leur développement. Par ailleurs la sécurisation de cet élevage est un élément important pour le maintien des relations sociales entre les communautés et la gestion concertée des ressources naturelles et du foncier.

    Une partie des réfugiés déplacés dans les pays voisins, notamment au Burkina Faso, sont actuellement en train de perdre leur bétail. Il faut dès à présent assurer le maintien de leurs sources de revenus notamment en garantissant la survie du bétail programme d’urgence. Permettre à ces groupes de ne pas perdre entièrement leur capital est indispensable sous peine de les condamner à une paupérisation brutale et persistante. L’enjeu est d’importance : sans ressources, vivant leur situation comme une injustice, les populations notamment les jeunes risquent de venir renforcer les rangs des extrémistes et mettre en danger la paix.

    V - Une réflexion au niveau régional, englobant l’ensemble du Sahel 


    Alors que le Mali a été le principal centre d'attention au cours des 12 derniers mois, bon nombre des problèmes que ce pays rencontre sont similaires au Sahel dans son ensemble. La variabilité des précipitations et l'instabilité climatique, la propagation du trafic de stupéfiants, le développement des mouvements djihadistes, et la pauvreté croissante sont des éléments communs du contexte qui conditionnent les perspectives des populations rurales et urbaines. Dans le même temps, la plupart des difficultés auxquelles est confronté le Mali en tant qu'Etat-Nation nécessite le soutien des pays voisins, étant donné son immensité et la difficulté de contrôle de ses frontières. Si le Mali peut profiter pleinement de la présence du fleuve Niger, par exemple, il doit nécessairement coordonner ses investissements dans l'irrigation et l'hydroélectricité avec les Etats riverains. Une approche régionale serait une des clés de l’éradication du commerce des stupéfiants et du contrôle efficace des groupes djihadistes. En tant que pays enclavé, le développement du Mali comme celui du Burkina Faso, le Niger et le Tchad, repose de manière importante sur les investissements en infrastructures réalisés par ses voisins bénéficiant d’une ouverture maritime. Enfin, les menaces liées à l'instabilité ont une incidence sur la région dans son ensemble, de sorte qu'une approche plus large de construction de la résilience au niveau local, national et régional ferait  plus sens.

    IIED & IRAM